Le débat est déjà clos.
Les IA sont là et seront bientôt si performantes qu’on ne saura plus reconnaitre si on a eu recours à elles ou pas dans la création d’une œuvre.
Pour le moment, on crie (en réalité pas tant que ça) au scandale quand Disney confie à une IA la création d’un générique comme celui de la série « Secret invasion ».
On secoue un peu la tête quand on apprend que la prononciation des acteurs anglophones du film « The Brutalist » a été corrigée par une IA pour « créer un dialogue hongrois si parfait que même les locaux ne verront aucune différence ».
Malgré quelques critiques, on accepte des films réalisés avec des IA dans les festivals d’animation.
Ce n’est pas encore la règle, mais elle le deviendra quand culturellement la situation sera acceptée.
Comme Godard a dit : « Il est de la règle de vouloir la mort de l'exception. »
Le changement est si rapide que, comme souvent, les règles et la juridiction ne suivent pas et on finira par accepter l’IA comme étant la norme.
Le débat est déjà clos.
Je suis réalisateur de film d’animation et dans ce milieu, l’attrait pour l’IA est très fort.
C’est l’une des raisons pour lesquelles j’écris ce texte et aussi pour vous inviter à réfléchir collectivement aux questions que nous impose l’existence de l’IA dans le cinéma.
Si nous qui écrivons, réalisons, illustrons, créons des images, des sons etc., évitons d’avoir recours aux IA et demandons aux écoles d’arts de renoncer à des formations dans le domaine de l’IA, alors probablement que ça ne changera pas grande chose, mais nous resterons des créateur.ices et nous conserverons l’un des droits les plus humains, celui de se tromper, de créer quelque chose d’inattendu et d’imparfait.
Des institutions (telle que FOCAL) proposent déjà des formations dans la pratique de l’IA alors que le questionnement n’a même pas eu le temps de s’installer.
Leur message est clair : utilisez les IA avec notre bénédiction et que le meilleur pilleur gagne (car c’est ce que fait une IA : piller ce qui a déjà été fait. Elle n’a pas d’imagination.)
D’ailleurs, ce n’est pas qu’une question créative mais productiviste également.
Avez-vous envie de voir, écouter, expérimenter des œuvres produites par des personnes ou par des machines ?
Cette question me semble si ridicule, sortie d’un vieux livre de SF, mais elle résume tout.
Le débat est déjà clos.
Le choix est simple.
Ce n’est qu’une question d’éthique.
Soit, vous pensez que la créativité existe et qu’elle est le résultat d’une expérience de vie, de notions réfléchies et de tentatives humaines (parfois infructueuses).
Soit, vous pensez que la créativité peut être déléguée à un robot.
L’IA est un outil réactionnaire qui rêve d’un fordisme créatif, d’une automatisation et d’une standardisation de la production artistique avec des humains au service de l’IA et non plus de l’œuvre.
Il s’agit d’un progrès qui vise à remplacer les humains dans des tâches qu’ils aiment, alors peut-on vraiment parler de progrès ?
D’un outil qui mène les individus au chômage, alors qu’ils ont choisi leur travail (c’est déjà rare dans ce monde). Est-ce alors vraiment un outil ?
Laissons les IA développer des vaccins pour les maladies à venir.
Choisissons d’assumer nos créations !
Ce texte est peut-être un peu maladroit, mais c’est un humain qui l’a écrit et avec son cœur !
Merci pour votre patience.
Hâte de découvrir ce que vous allez créer de nouveau !
Marcel Barelli,
Réalisateur de film d’animation.
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