
Carancho
Mais Trapero orchestre aussi un splendide mélo grâce à son couple qui décident de quitter ensemble cet enfer urbain et grâce à son sens de la mise en scène qu'il utilise comme le bâton dans leurs roues, venant contrecarrer leur projet de bonheur. Il recourt à plusieurs reprises à une superbe astuce qui peut sembler anodine, en cadrant ses protagonistes au bord du cadre scope de son image, comme si ces derniers essayaient de s'évertuer à ne pas y figurer, puis, imperceptiblement, il les recadre très lentement afin qu'ils soient au centre de l'écran à la fin du plan, comme s'il étaient rattrapés par leur destin. Dans le même esprit, il se sert merveilleusement du plan-séquence qui finit toujours par remettre Sosa et Lujan à leur place, leur interdisant ainsi toute forme d'échappatoire, comme dans les impressionnantes prises de vue de l'intérieur d'un véhicule avant la collision.
Rajoutez encore une interprétation irréprochable de Ricardo Darin (Les Neuf Reines, Dans ses yeux) et Martina Gusman, compagne du réalisateur qu'il avait déjà dirigée dans son Leonera d'excellente mémoire et vous obtenez une nouvelle fois la preuve que le cinéma argentin se porte très bien.